Une passation de licence historique

Pine-Falls

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Le 28 février 2019, la Province du Manitoba a fait une annonce qui restera dans l’Histoire : elle transfère la licence de gestion de la forêt de Pine Falls aux Premières Nations de la région.

      

Sheldon Kent – Chef de la Première Nation de Black River, Rochelle Squires – Ministre du Développement durable, Edmond LaBossière – Président du CDEM, au Palais législatif du Manitoba

Depuis la fermeture en 2009 de l’usine de pâte à papier Tembec à Pine Falls, la forêt est restée inexploitée. Quelques projets économiques ont été tentés mais aucun n’a eu de succès.

Le 28 février 2019, la Province et les Premières Nations de Hollow Water, Black River, Sagkeeng et la Brokenhead Ojibway Nation ont signé un partenariat pour que ces Premières Nations soient en charge de la gestion de la forêt. Pour ces derniers, c’est un accomplissement immense, une reconnaissance inédite qui s’inscrit bien dans le processus de réconciliation nationale.

« En tant que Premières Nations, nous avons toujours été exclus de la table de décision au sujet de la forêt de Pine Falls alors qu’elle est dans notre cour arrière, déplore le chef de la Première Nation de Black River, Sheldon Kent. Tembec avait les droits sur la forêt, obtenait tous les contrats, tirait toutes les ficelles.

 
 
 

« C’est pourquoi, depuis le début des années 2000, on travaillait ensemble entre Premières Nations pour voir comment on pouvait prendre notre part. Quand Tembec a fermé, ça nous a ouvert une porte. »

Il confie que c’est grâce à l’ouverture en 2005 du casino South Beach, un projet entièrement mené et détenu par des Premières Nations dont celle de Black River, que le rêve n’est pas resté sans suite. « Ça nous a prouvé qu’on était capables de mettre sur pied des projets à succès de plusieurs milliers de dollars », explique chef Sheldon Kent.

Après ça, plus rien ne pouvait les arrêter. Leader dans ce projet au nom des quatre Premières Nations concernées dans la région, le chef Sheldon Kent s’est alors appuyé sur le CDEM et l’expert conseil en affaires chez Legacy Bowes Group, Terry Brown, pour parvenir aujourd’hui à ce transfert historique.

« On veut travailler en collaboration avec toutes les communautés de la région, Premières Nations ou non, assure chef Sheldon Kent. Toutes ont à y gagner, incluant les communautés bilingues du CDEM. On veut aussi des universités à la table. C’est nécessaire pour poser les bases pour le succès. »

Deux ans pour lancer le projet

Terry Brown précise que « la licence accordée par la Province est d’une durée de deux ans renouvelable, ce qui devrait donner le temps nécessaire de définir le projet d’exploitation de la forêt qui sera mené et de former la main-d’œuvre ».

En effet, les partenaires doivent encore explorer leurs options. « Idéalement, on voudrait suivre le modèle de Chantiers Chibougamau au Québec, qui vend ses produits de bois finis directement aux États-Unis, indique chef Sheldon Kent.

« Mais il reste beaucoup à faire avant d’atteindre ce scénario, notamment faire un inventaire de l’état de santé de la forêt car il y a beaucoup de castors dans les rivières de la région qui l’ont peut-être endommagée. Après cette évaluation, nous pourrons mieux déterminer l’orientation de nos affaires. »

Les possibilités sont multiples, allant du biodiésel au bois stratifié croisé, ou encore au bois lamellé collé. Le bois est aujourd’hui de plus en plus utilisé dans projets structurels majeurs, tels que des ponts. « Quand on dit forêt, les gens pensent souvent scierie, mais il y a beaucoup d’autres choses qu’on peut faire avec du bois », fait remarquer chef Sheldon Kent.

 

« Il y a un haut niveau de demande, à la fois pour le produit et la technologie, renchérit Terry Brown. En Suède par exemple, ils utilisent de la poussière de bois compressée pour se chauffer. Le tout, c’est de définir un modèle qui pourra s’adapter au temps, contrairement à l’usine de pâte à papier dans le passé. »

Si les investissements pour remettre la forêt en état d’exploitation risquent fort d’être élevés, le chef assure cependant qu’il n’attend pas d’aide financière de la Province. « Nous savons que la Province a un déficit à combler. L’important pour nous, c’est la licence. De là, nous saurons bâtir un plan d’affaire solide. »

Organisme chapeau du CDEM, le Réseau de développement économique et d’employabilité du Canada est heureux d’avoir contribué à l’effort.

 

« On est partenaires depuis trois ans de cette initiative, indique son directeur général, Jean-Guy Bigeau. On a notamment facilité des rencontres très productives avec des acteurs clé au sein de notre réseau, et nous continuerons de tout faire pour faire réussir ce partenariat historique. »

Pour sa part, le président du CDEM, Edmond Labossière, se dit « impressionné par l’état avancé de préparation à collaborer de tous les partenaires confirmés comme potentiels. C’est très prometteur, et les Premières Nations font un travail de leaders remarquable dans ce projet ».

« Avec cette licence de gestion de la forêt, on va enfin pouvoir réaliser le rêve sur lequel on a travaillé toutes ces années, conclut chef Sheldon Kent. Ça prendra encore du temps, de l’énergie, des capitaux, mais nous sommes prêts. »

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